Édito
Le psychomotricien a un rôle essentiel à jouer dans le développement des compétences cognitives de l’enfant et de l’adolescent voire de l’adulte. Le bilan psychomoteur, les tests et l’enseignement théorico-pratique diffusés pendant les études lui fournissent les premiers outils adaptés pour repérer où en est l’enfant quant à ses difficultés cognitives. L’approche logicomathématique peut compléter et développer ses capacités d’analyse du raisonnement tant logique que mathématique et spatial. Le psychomotricien repère l’aptitude du sujet à mobiliser sa pensée, à rentrer dans un codage et à fonctionner dans celui-ci, à retrouver un parcours spatiotemporel à partir de traces laissées. De même pour la faculté de manipuler plus aisément la combinatoire (exploration des différents possibles, coordination des points de vue, spatial, numérique, linguistique…), de construire des liens et de favoriser l’enracinement des schèmes de raisonnement dans la réalité.
Francine Jaulin-Mannoni, orthophoniste, docteur en psychologie, s’est intéressée aux travaux d’épistémologie génétique de Piaget, à la phénoménologie d’Husserl et de Merleau-Ponty, qui ont cherché à analyser les sources de la connaissance et à définir la démarche psychologique qui fonde la pratique scientifique. Parallèlement, elle a étudié la logique aristotélicienne et porté un regard critique sur son évolution au cours des siècles. Préoccupée par le problème des difficultés d’apprentissage en mathématiques, c’est à partir de l’observation d’enfants présentant des pathologies graves et de l’étude des filiations des structures de pensée qu’elle a mis au point des techniques de rééducation reposant sur une analyse logique rigoureuse du raisonnement. En 1973, est fondé le Groupe d’Etudes de la Psychopathologie des Activités Logico-mathématiques, destiné essentiellement à l’origine aux orthophonistes, vite rejoints par d’autres professionnels confrontés aux troubles des apprentissages.
Les articles que nous vous proposons illustrent ce large éventail des domaines d’action thérapeutique auprès de sujets souffrant de handicaps divers. Qu’ils interviennent auprès d’enfants ou d’adolescents I.M.C, sourds, dyspraxiques, dyscalculiques, malmenés scolaires ou d’adultes handicapés mentaux, les praticiens ont tous le même objectif : combler les déficits décelés dans les domaines de l’espace, du temps, des structures logiques et infralogiques pour consolider les bases de l’édifice cognitif nécessaire à tout individu pour accéder au savoir. Tous ont le souci de fonder leurs pratiques sur les structures du réel sans oublier que : « Ce ne sont pas les manipulations qui organisent la pensée. C’est la pensée, qui, confrontée à ces manipulations, s’organise pour résoudre les problèmes qu’elles lui posent » (Jaulin-Mannoni, 1999).
Brigitte Feuillerat et Raymonde Hivert